★★★☆☆, Critiques de Films

[Critique] Premier Contact

affiche-bis-premier-contactLorsque de mystérieux vaisseaux venus du fond de l’espace surgissent un peu partout sur Terre, une équipe d’experts est rassemblée sous la direction de la linguiste Louise Banks (Amy Adams) afin de tenter de comprendre leurs intentions. Face à l’énigme que constituent leur présence et leurs messages mystérieux, les réactions dans le monde sont extrêmes et l’humanité se retrouve bientôt au bord d’une guerre absolue. Louise Banks et son équipe n’ont que très peu de temps pour trouver des réponses. Pour les obtenir, la jeune femme va prendre un risque qui pourrait non seulement lui coûter la vie, mais détruire le genre humain…

Après les excellents Prisoners, Enemy et Sicario, et juste avant Blade Runner 2049 l’an prochain, Denis Villeneuve s’essaye cette année à la science-fiction avec Premier Contact (Arrival en VO). Une première incursion dans le genre plutôt réussie en ce qui le concerne puisque si le script laisse clairement à désirer dans la seconde moitié du film, la mise en scène du réalisateur canadien est, quant à elle, une nouvelle fois irréprochable. Élégante et majestueuse, elle se départ brillamment de certaines références évidentes (2001 – L’Odyssée de l’Espace et Rencontres du Troisième Type, notamment) pour conférer au long-métrage son identité propre. Une identité propre qui passe également par l’incroyable atmosphère – tantôt pesante, tantôt émouvante – que le film dégage pendant près de 2 heures. Pas étrangère à cette atmosphère étouffante, la composition musicale de Jóhann Jóhannsson renforce joliment les sensations que le cinéaste cherche à procurer. Alors que d’un point de vue purement émotionnel, le superbe morceau On the Nature of Daylight, de Max Richter (qui fait actuellement des merveilles dans la série The Leftovers), suscite instantanément une profonde mélancolie, aussi belle que dévastatrice.

photo-premier-contactAux nombreuses qualités formelles du film s’ajoute par contre un scénario relativement inégal. Sans quoi le statut de chef d’œuvre, que l’on peut lire dans certaines critiques, n’aurait vraiment pas été usurpé. Ainsi, dans sa première heure, Premier Contact se révèle passionnant dans sa manière d’aborder la rencontre avec un peuple extraterrestre par le prisme de la communication, et plus particulièrement du langage. Rigoureux dans son approche linguistique, le long-métrage offre un vrai parti pris de science-fiction. Malheureusement, la deuxième heure se laisse aller à une pirouette scénaristique malvenue pour résoudre son intrigue. Non seulement celle-ci discrédite complètement l’aspect scientifique mis en avant dans toute la première partie du récit, mais elle rend aussi caduque l’ouverture du film. Pour des raisons que je n’évoquerais pas ici (au risque de spoiler), il est en effet techniquement impossible pour l’héroïne de voir ce qu’elle voit à ce moment-là de l’histoire. Le montage est donc au mieux trompeur, au pire assez malhonnête. Paradoxalement, c’est aussi pourtant de ce ressort narratif un peu facile que naissent les plus grandes émotions du long-métrage, il n’a donc pas que des conséquences négatives. Enfin, côté casting, Amy Adams affiche une belle subtilité dans son jeu, soutenu ici par un Jeremy Renner tout en retenue.

En définitive, Premier Contact est donc une proposition de cinéma ambitieuse, aboutissant à une œuvre de science-fiction singulière. Irréprochable techniquement, le film peine néanmoins à convaincre totalement sur le fond, la faute à une pirouette scénaristique remettant complètement en cause la crédibilité scientifique du projet. Dommage car il ne manquait pas grand-chose pour confiner à la perfection.

À propos de Wolvy128

Fondateur et rédacteur du site. Passionné de cinéma depuis mon plus jeune âge, je profite de ce blog pour partager ma passion au quotidien.

Discussion

10 réflexions sur “[Critique] Premier Contact

  1. Oh tu n’as pas aimé le twist ? Je l’ai trouvé plutôt réussi même si je comprends cette idée qu’on a l’impression de s’être fait avoir… Peut-être qu’un deuxième visionnage est nécessaire pour voir si certains « indices » étaient dispersés le long du récit.

    Publié par cinemathequedeclelia | décembre 8, 2016, 10:07
    • Même en me projetant, j’ai effectivement du mal avec le twist. Je n’y adhère pas du tout, je le trouve très facile, en plus de trancher totalement avec l’approche rigoureuse de tout ce qui précède. Il engendre, de surcroît, une belle incohérence (peut-être d’autres mais faudrait que je le revois). Mais j’avoue qu’à part ça, le film est très bon.

      Publié par Wolvy128 | décembre 8, 2016, 10:14
  2. Je te trouve dur avec le twist 🙂 Chronologiquement, on peut penser que la 1ère scène intervient au moment où elle intervient, mais on peut aussi se dire qu’une fois qu’Amy Adams a accédé à la connaissance de la langue, le temps n’est plus le même et ce que l’on voit au début à travers ses yeux n’a plus lieu d’être ramené à la chronologie linéaire initiale. C’est d’ailleurs à mon sens l’un des enjeux du film.
    Voici comment j’ai interprété ce point crucial qui t’a dérangé, et voici donc pourquoi je le range dans la catégorie chef d’oeuvre, comme tant de films de l’ami Denis… 🙂 D’ailleurs, une analyse rapprochant Premier Contact et Enemy serait intéressante je trouve !
    J’ai lu la nouvelle dont est issu ce film, la dimension « guerre des gouvernements » a été rajouté, ce qui ne me semble pas être un mauvais choix pour le format ciné.

    Publié par misterniku | décembre 21, 2016, 5:54
    • J’ai eu l’occasion de lire ailleurs l’explication que tu avances concernant l’incohérence que je souligne dans ma critique et je reconnais qu’elle a du sens au regard des thèmes du film. Ce qui confirme l’excellent travail de Villeneuve. Je reste en revanche toujours un peu déçu du twist qui, je trouve, tranche complètement avec la première partie du récit. Ce qui était décortiqué dans le détail au départ est effectivement balancé sans explication profonde ici.

      Publié par Wolvy128 | décembre 21, 2016, 6:27
  3. La nouvelle, après quelques lignes, lance un « Veux-tu un enfant ? » qui illustre selon moi la problématique du film : « Si l’on connaissait notre vie en entier, en jouirait-on plus, moins, autrement ? » Tous les flashs que l’on voit dès le début du film sont là selon moi pour arriver à ce choix crucial à la fin : est-ce que tu acceptes de faire un enfant quand tu sais ce qu’elle va subir ?
    On en revient à cette idée de « cadeau ». Le bébé est un cadeau, au même titre que les extra-terrestres donnent un cadeau. Qu’en adviendra-t-il dans 3000 ans quand ils se feront attaquer ? Ne serait-ce pas la fin de notre planète Terre si elle s’engage dans cette cause ? Mais là vie vaut quand même le coup d’être vécue. En opposition à tous ces gouvernements qui voient un danger à la place du cadeau. Le bébé est aussi un danger, il est source d’inquiétudes, de profondes tristesses.
    L’héroïne fait son choix, pas parce qu’elle a confiance en l’avenir, mais parce qu’elle préfère vivre intensément le moment présent, quitte à devoir subir des instants de pure détresse.
    Ca te semble cohérent ? 🙂

    Publié par misterniku | décembre 22, 2016, 7:29
    • Je n’ai aucun problème par rapport à ça, l’explication de ses flashs en début de film a du sens après coup, j’en conviens.

      Ce qui me gêne, c’est plutôt la capacité exceptionnelle que le personnage acquiert sans réelle explication, si ce n’est que son apprentissage du langage extraterrestre a changé sa perception au temps. Je trouve cette résolution un peu facile. Elle contraste avec l’approche si détaillée de la première partie.

      Publié par Wolvy128 | décembre 22, 2016, 9:07
  4. Ca renvoie à la partie « Notre façon de penser est conditionnée par notre langage. » Un anglais ne raisonnera pas comme un japonais car ils ne parlent pas la même langue. Poussée « à l’extrême » du langage extraterrestre, ça pourrait donner ça. 🙂
    Pour moi, on est dans le vrai domaine de la Science-fiction : c’est solide au niveau scientifique et ça ouvre des champs fictionnels. On entre dans les mondes de Dick 🙂

    Publié par misterniku | décembre 22, 2016, 9:13
    • Le concept tient la route mais l’extrapolation est certainement trop extrême pour moi. C’est plus de la pure fiction que de la véritable science à ce niveau-là. 😉

      Mais je reverrais le film avec plaisir en vidéo pour me faire une seconde opinion, je suis peut-être un peu trop exigeant sur ce coup-là.

      Publié par Wolvy128 | décembre 22, 2016, 9:17
  5. D’une façon générale, tu aimes la SF ? Au ciné et en livre ? 🙂

    Publié par misterniku | décembre 22, 2016, 10:44

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