★★★★☆, Critiques de Films

[Critique] Boyhood

Affiche boyhoodChaque année, durant 12 ans, le réalisateur Richard Linklater a réuni les mêmes comédiens pour un film unique sur la famille et le temps qui passe. On y suit le jeune Mason (Ellar Coltrane) de l’âge de 6 ans jusqu’ à sa majorité, vivant avec sa sœur (Lorelei Linklater) et sa mère (Patricia Arquette), séparée de son père (Ethan Hawke). Les déménagements, les amis, les rentrées des classes, les premiers émois, les petits riens et les grandes décisions qui rythment sa jeunesse et le préparent à devenir adulte…

Si le thème du passage à l’âge adulte, ou plus généralement de l’adolescence, a déjà été maintes fois exploité au cinéma, avec des fortunes parfois diverses, il ne l’a en tout cas jamais été de cette façon. En choisissant de filmer les mêmes acteurs pendant 12 ans, à raison d’un mois chaque année, Richard Linklater parvient en effet à insuffler à son long-métrage une authenticité et une sincérité déconcertante. On oublie d’ailleurs rapidement qu’il ne s’agit que d’un simple film pour se laisser porter par le quotidien aigre-doux de Mason et le naturel désarmant des acteurs. Il faut dire que le réalisateur a la bonne d’idée d’ancrer profondément la fiction dans le réel, en suivant notamment habilement l’évolution des modes (musicales, littéraires, vestimentaires…) et de la technologie (téléphone, ordinateur…), afin de coller autant que possible aux époques traversées. Le récit s’étendant sur une bonne dizaine d’années, c’est typiquement le genre de détails qui peut avoir son importance pour rendre la progression de l’histoire cohérente. Il en découle du coup une crédibilité accrue qui renforce encore un peu plus le sentiment de réalité qui entoure le film. Et au vu du parcours long et périlleux qu’un tel projet représente, on ne peut que se réjouir que le résultat obtenu transcende à ce point le concept initial.

Photo boyhood

Mais si le film est aussi prenant, bien qu’il ne propose pourtant aucun rebondissement majeur dans son récit, c’est en grande partie pour l’intérêt presque universel de son sujet. Sans avoir forcément vécu les mêmes choses que le héros, il est effectivement bien difficile de ne pas se reconnaître dans certaines étapes qu’il traverse tant elles ont un large rayonnement. Qu’il s’agisse de la difficulté liée aux familles recomposées, de la découverte de l’amitié ou tout simplement de la naissance des premiers sentiments amoureux, on a généralement tous des souvenirs plus ou moins marqués de certains de ces événements. Notre rapport au film est donc très personnel puisque chaque spectateur y projette en fin de compte ce qu’il veut en fonction de ses propres expériences, bonnes ou mauvaises. Le long-métrage est d’ailleurs loin de proposer une vision de la vie sans le moindre accroc. Effectivement, les pépins sont nombreux et contribuent à la crédibilité de l’histoire puisque la réalité est faite, elle aussi, de bons et de mauvais moments. Au niveau du casting, si les expérimentés Ethan Hawke et Patricia Arquette se montrent convaincants, il est surtout intéressant de constater que le jeune Ellar Coltrane s’en sort honorablement dans la peau du personnage principal. Certes, le scénario a évolué au fil des ans pour coller au caractère du jeune homme mais nul n’aurait pu prédire au départ comment il allait s’en sortir en tant qu’acteur en prenant de l’âge. Le pari était donc risqué mais le résultat est heureusement tout à fait concluant. Enfin, comment ne pas évoquer pour terminer l’incroyable variété de la bande son qui accentue les moments marquants de la vie de Mason au rythme des morceaux de Coldplay, Arcade Fire ou Cat Power. Un régal !

Plus qu’un film sincère et touchant, Boyhood se révèle donc en définitive un drame humain d’une incroyable portée, s’appuyant sur un concept ambitieux pour offrir au spectateur une tranche de vie totalement inédite, dont on regrettera seulement les quelques longueurs de sa dernière partie. Petit coup de cœur !

À propos de Wolvy128

Fondateur et rédacteur du site. Passionné de cinéma depuis mon plus jeune âge, je profite de ce blog pour partager ma passion au quotidien.

Discussion

11 réflexions sur “[Critique] Boyhood

  1. Il a l’air vraiment pas mal.
    J’adore l’histoire ! Ton avis aussi donne envie de le visionner

    Publié par Mlle Latino | juillet 23, 2014, 6:10
    • Même s’il ne se passe rien d’extraordinaire, c’est vraiment un film à voir selon moi ! Le concept est intéressant et confère au long-métrage une authenticité quasiment inégalable.

      Publié par Wolvy128 | juillet 23, 2014, 6:13
  2. Ton commentaire est très positif et ne fait qu’accroître ma curiosité envers ce film. Je n’avais pas du tout entendu parler de ce projet de Linklater avant la sortie. Je trouve cette idée incroyable et formidable, une manière tout à fait inédite de faire du cinéma. Il faut néanmoins se bloquer deux heures quarante à passer en compagnie de cette charmante famille texane et surtout trouver un ciné qui le programme. Je reste aux aguets.

    Publié par princécranoir | juillet 24, 2014, 7:06
    • Oui, c’est vrai que les 2h45 peuvent sembler très long car il n’y a aucun véritable suspense. Pour autant, la fiction est tellement proche de la réalité qu’on ne peut que se retrouver dans un tel film.

      Publié par Wolvy128 | juillet 24, 2014, 2:54
  3. Hey Wolvy, J’aime beaucoup ce que tu dis à propos de ce film, c’est ce à quoi je m’attends. L’histoire semble exactement telle qu’elle doit être puisqu’elle est censée raconter la vie d’un jeune garçon sur une période bien précise. Je le verrai sans aucun doute.
    Je souhaiterais ajouter ton blog sur le mien, avec ton accord bien entendu, mais je n’ai pas la moindre idée de comment m’y prendre. Si jamais tu savais, you’re very welcome.
    B.

    Publié par LadyB.Glam | août 5, 2014, 2:53
    • Bonjour Lady, c’est un film qui en rebutera sans doute certains au vu de sa durée et du peu de rebondissements qu’il a à offrir mais c’est une expérience de cinéma troublante de sincérité. Je le recommande sans problème.

      Aucun souci pour procéder à un échange de lien entre nos blogs sinon, je suis toujours ouvert à échanger sur le cinéma avec d’autres passionnés. Normalement, tu dois avoir une rubrique « Liens » dans le panneau d’administration de ton blog où tu peux ajouter des sites amis.

      Publié par Wolvy128 | août 5, 2014, 3:01
      • Bonjour, bizarrement je n’ai pas réussi à trouver cette rubrique « liens », et tout ce que j’ai pu finalement ajouter ce ne sont que deux panneaux « movies » et  » tvshows » sur lesquels je ne peux même pas cliquer moi-même. Elle est bien forte celle-là. 🙂
        Je demanderai de l’aide rapidement.
        Concernant Boyhood, tu m’as donné encore plus envie de le voir. Ce n’est pas tant l’idée de base (collecter des années d’images) qui m’attire, c’est l’interprétation plus que tout. Mais je te dirai franchement ce que j’en ai pensé après l’avoir regardé.
        Talk to u soon 🙂

        Publié par LadyB.Glam | août 6, 2014, 12:40
        • D’accord, j’attends ton retour alors ! 🙂

          Et pour le lien, n’hésite pas à me prévenir quand c’est fait, comme ça je peux t’ajouter.

          Publié par Wolvy128 | août 6, 2014, 2:46
  4. C’est toujours extra de découvrir un réalisateur qui peut être touché, influencé, travaillé par un Truffaut ou un Rohmer comme l’est Linklater. Ces films ont le temps pour matière première… Même ses films mineurs, ses comédies avec enfants, adolescents ou étudiants en bande valent le détour pour voir l’expression de ses représentations et de ses souvenirs… Linklater à la recherche du temps perdu.

    Je conseille vivement la trilogie des Before pour tracer un lien évident avec Boyhood à propos du temps pris avec ses acteurs pour donner une vie durable à ses personnages.

    Publié par ornelune | janvier 16, 2017, 8:08

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