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[Critique] Oppenheimer

En 1942, convaincus que l’Allemagne nazie est en train de développer une arme nucléaire, les États-Unis initient, dans le plus grand secret, le « Projet Manhattan », destiné à mettre au point la première bombe atomique de l’histoire. Pour piloter ce dispositif, le gouvernement engage J. Robert Oppenheimer, brillant physicien, qui sera bientôt surnommé « le père de la bombe atomique ». C’est dans le laboratoire ultra-secret de Los Alamos, au cœur du désert du Nouveau-Mexique, que le scientifique et son équipe mettent au point une arme révolutionnaire dont les conséquences, vertigineuses, continuent de peser sur le monde actuel.

Après le film de guerre avec Dunkerque, puis le thriller d’espionnage avec Tenet, Christopher Nolan explore avec Oppenheimer un tout nouveau genre, celui du biopic historique. Fidèle à ses bonnes habitudes, le réalisateur britannique ne se contente cependant pas d’appréhender simplement le genre, il se l’approprie littéralement pour y insuffler son propre style (narratif, artistique…). Ainsi, à travers le parcours fascinant du célèbre physicien américain, le long-métrage ne donne pas seulement à voir l’un des moments les plus importants de l’histoire de l’humanité, il propose également une expérience sensorielle aussi intense que tragique.

Loin du biopic traditionnel, Oppenheimer impressionne avant tout par l’immense ambition de son scénario, s’appuyant brillamment sur la complexité de son héros pour questionner les enjeux humains, politiques et scientifiques de sa terrible invention. Des questions passionnantes dont le cinéaste se garde bien d’apporter des réponses catégoriques, préférant au contraire mettre en perspective les différentes thématiques qui gravitent autour de son sujet : la prouesse technologique que représente la bombe atomique, sa récupération politique et militaire, ses conséquences humaines, son impact sur le monde moderne… Il en découle dès lors une oeuvre particulièrement dense et exigeante, dont la durée de 3 heures sera certainement une véritable épreuve pour les spectateurs ayant des difficultés à rentrer dans le film. Heureusement, Nolan multiplie les efforts pour favoriser l’immersion dans le récit. Outre l’intérêt croissant de l’histoire, on soulignera notamment le travail minutieux effectué sur le son. D’abord envahissante, la composition de Ludwig Göransson s’impose en effet progressivement comme un personnage à part entière de l’histoire. Couplée à la précision du montage, elle construit une symphonie grandiose, venant transcender quelques moments de cinéma inoubliables.

Formellement remarquable, le long-métrage s’offre aussi un casting prestigieux pour porter à l’écran son épopée nucléaire : Cillian Murphy, Robert Downey Jr., Emily Blunt, Matt Damon, Josh Hartnett, Florence Pugh, Jason Clarke… Tous livrent une prestation convaincante mais force est de constater que les deux premiers tirent nettement leur épingle du jeu, le scénario leur réservant assurément quelques-unes des séquences les plus mémorables du film. Cillian Murphy, tout d’abord, incarne magistralement Robert Oppenheimer. Non seulement l’acteur parvient à retranscrire toute la complexité du personnage, à la fois intelligent, déterminé et torturé, mais il lui confère également une émotion touchante, particulièrement palpable lorsque sa création commence à lui échapper. Robert Downey Jr., ensuite, nous gratifie quant à lui de l’une de ses meilleures performances dans la peau de l’homme politique Lewis Strauss, figure marquante du développement de l’énergie nucléaire et des armes nucléaires aux États-unis. Quasiment méconnaissable, l’acteur éclabousse chacune des scènes de son charisme et de son talent. Malgré ce constat excessivement élogieux, le film n’évite toutefois pas quelques défauts mineurs tels qu’une introduction extrêmement laborieuse ou une écriture parfois trop pauvre des personnages.

Véritable tour de force visuel et sonore, Oppenheimer s’impose donc comme un biopic historique d’une incroyable ambition. S’appuyant brillamment sur la complexité de son héros pour questionner les enjeux humains, politiques et scientifiques de sa terrible invention, le film ne donne pas seulement à voir l’un des épisodes les plus importants de l’histoire de l’humanité, il propose également une expérience sensorielle aussi dense que tragique. Monumental !

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À propos de Wolvy128

Fondateur et rédacteur du site. Passionné de cinéma depuis mon plus jeune âge, je profite de ce blog pour partager ma passion au quotidien.

Discussion

5 réflexions sur “[Critique] Oppenheimer

  1. Avatar de Anton Chigurh

    Bonjour,

    Je suis assez d’accord avec votre critique. Pour ma part j’ai aimer ce film et venant de Nolan je m’attendais à quelque chose de particulier, ce qui a été le cas encore une fois.
    Avant d’aller voir le film j’avais regarder le documentaire Oppenheimer, l’homme et la bombe, cela m’a permis de mieux saisir le film.
    Je pense que nous savons qu’avec Nolan il faut s’attendre à vivre une expérience plus que d’aller voir un film dans le sens propre. Mon avis est que ce film est une réussite, peut-être légèrement trop long mais serait-il aussi percutant en étant un peu plus court ?…

    Publié par Anton Chigurh | août 7, 2023, 7:55
    • Avatar de Wolvy128

      Bonjour ! Je suis d’accord, tous les projets de Nolan proposent une véritable expérience aux spectateurs. En ce qui me concerne, la longueur ne m’a pas dérangé mais il faut reconnaître que 3 heures, c’est conséquent. Le film aurait peut-être gagné à être plus resserré. Cela dit, je ne vois pas bien ce qu’il aurait pu enlever. Toutes les séquences me semblent nécessaires.

      Publié par Wolvy128 | août 7, 2023, 11:33
  2. Avatar de Christine Arnaud

    Je n’ai pas vu les 3 heures passées, personnellement. L’histoire est fidèle à la réalité et parvient à captiver l’attention du téléspectateur. Toutefois, les dialogues sont parfois un peu trop complexes et difficiles à suivre.

    Publié par Christine Arnaud | novembre 13, 2023, 5:53
  3. Avatar de sebmagic

    Ohlala je ne suis pas passé ici depuis si longtemps, je ne savais pas que t’étais encore en activité dans la critique ciné ! J’ai moi-même repris il y a quelques années, je me suis dit « allons voir ce que devient Wolfy », j’ai été assez surpris de voir ton blog encore en activité 😉

    Publié par sebmagic | mars 23, 2024, 11:45

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