Charlie (Joaquin Phoenix) et Eli Sisters (John C. Reilly) évoluent dans un monde sauvage et hostile, ils ont du sang sur les mains : celui de criminels, celui d’innocents… Ils n’éprouvent aucun état d’âme à tuer. C’est leur métier. Charlie, le cadet, est né pour ça. Eli, lui, ne rêve que d’une vie normale. Ils sont engagés par le Commodore pour rechercher et tuer un homme. De l’Oregon à la Californie, une traque implacable commence, un parcours initiatique qui va éprouver ce lien fou qui les unit. Un chemin vers leur humanité ?
Adapté du roman éponyme de Patrick deWitt, Les Frères Sisters est le premier long-métrage américain de Jacques Audiard (De batte mon cœur s’est arrêté, Un Prophète, De Rouille et d’Os, Dheepan). Pour l’occasion, le célèbre réalisateur français s’attaque au genre toujours délicat du western. Avec un succès somme toute relatif au final puisque si le film brille indéniablement par ses nombreuses qualités formelles, il pèche néanmoins à plusieurs reprises sur le fond. Au-delà de l’installation plutôt laborieuse, on regrettera tout particulièrement le manque d’amplitude de l’œuvre. Malgré un cahier des charges admirablement rempli, il manque en effet au projet cette énergie douce et féroce qui fait habituellement la force des grands westerns. En outre, si le thème de l’amour fraternel trouve dans la trajectoire des deux frangins un formidable écho, les péripéties du duo ne sont pas toujours palpitantes. L’histoire, dans sa globalité, semble d’ailleurs parfois simplement servir de prétexte pour évoquer le lien puissant entre les deux assassins. Un défaut malheureux, certes, mais pas spécialement handicapant au regard de l’intérêt indiscutable qui émane de la relation fraternelle.
Formellement, en revanche, le film se revèle d’excellente facture, chacun des paramètres techniques étant parfaitement exécutés. Outre la mise en scène toujours aussi soignée de Jacques Audiard, on retiendra notamment la superbe photographie du Belge Benoît Debie. Pendant près de 2 heures, le long-métrage regorge ainsi de plans magnifiques, conséquence directe d’une belle composition graphique, bien sûr, mais aussi d’un soin minutieux accordé aux décors et aux costumes. Sans être mémorable, la bande originale d’Alexandre Desplat accompagne aussi joliment l’ensemble. L’atout principal de l’œuvre réside néanmoins surtout dans son casting d’exception. A commencer par le duo composé de Joaquin Phoenix et John C. Reilly. Si les deux acteurs évoluent, bien entendu, dans un registre loin d’être inhabituel pour eux, ils livrent tout de même une interprétation particulièrement habitée. Non seulement ils s’avèrent convaincants dans leur rôle respectif, mais ils affichent également une belle alchimie. Une alchimie qui conditionne à n’en pas douter la puissance de leur relation. A leurs côtés, Riz Ahmed et Jake Gyllenhaal complètent brillamment le tableau dans des rôles toutefois plus discrets.
Pour son premier long-métrage américain, Jacques Audiard signe donc un western de très bonne facture. Sa réalisation attrayante, la belle photographie de Benoît Debie et la grande justesse du casting ne parviennent toutefois pas à éclipser totalement les faiblesses du scénario. Un film plaisant, en somme, mais inégal.
Je vois que nos avis sont sensiblement les mêmes 😉
Je viens de lire ta critique, effectivement ! 🙂
Je t’avoue que j’ai un peu de mal à comprendre l’engouement autour du film. C’est très correct, et plutôt plaisant, mais ça reste assez mineur pour le genre je trouve.
Un film qui m’a déçu par sa fin essentiellement. Mais le traitement original du genre lui donne néanmoins belle allure.
Et je confirme que l’interprétation est superbe.
Par curiosité, que reproches-tu exactement à la fin ?
Expédiée, régressive, pas cohérente et surtout pas intéressante au regard du projet utopique avancé par le scénario. J’en dis plus ici : https://letourdecran.wordpress.com/2018/09/30/les-freres-sisters/
Je comprends mieux ton point de vue à la lecture de ton billet. Et je ne suis pas loin de le partager d’ailleurs.